Le juge européen et les maternités de substitution : l'imbroglio italien
Pour satisfaire l'Italie et la « morale » de ses juges, la CEDH, statuant en appel, reconnaît dans une décision bancale, mais hautement politique, que le retrait d'un enfant né par GPA à ses parents d'intention ne constitue pas une violation de la convention européenne des droits de l'homme.
CEDH, 24 janv. 2017, n° 25358/12
Quand le cynisme des juges l’emporte sur l’intérêt de l’enfant.
À peine quelques jours après la condamnation pour la cinquième fois de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme pour avoir refusé de transcrire l’état civil d’enfants nés à l’étranger par gestation pour autrui (GPA) (CEDH, 19 janv. 2017, n° 44024/13, Laborie c/ France), la grande chambre de cette même Cour vient de rendre contre toute attente, par 11 voix contre 6, une décision particulièrement critiquable, en affirmant dans la très médiatique et controversée affaire Paradiso et Campanelli, qu’un enfant né de GPA peut être retiré à ses parents d’intention en l’absence de liens biologiques sans qu’il y ait violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la convention européenne des droits de l’Homme.
Cette décision surprenante, par laquelle la grande chambre inverse un jugement de première instance1 qui avait condamné en 2015 l’État italien à indemniser un couple ayant eu recours à la gestation pour autrui en Russie, suscite déjà de[...]
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CEDH, 27 janv. 2015, n° 25358/12, Paradiso et Campanelli c/ Italie.
V. en ce sens l’argumentation délirante du juge Dedov dans son opinion concordante sous l’arrêt qui place le débat concernant la maternité de substitution dans un combat entre les sociétés civilisés et les sociétés non civilisées.
Le terme de GPA recouvre plusieurs situations différentes, v. La gestation pour autrui : Rapport 09-05, Académie nationale de Médecine, Bull. acad. nat. méd., 2009, 193, n° 3, 583-618, séance du 10 mars 2009.
À cette même date, la mère porteuse donna son consentement écrit pour que l’enfant soit enregistré comme le fils des requérants. Sa déclaration écrite datée du même jour, lue à voix haute à l’hôpital en présence de son médecin, du médecin-chef et du chef de division de l’hôpital, est ainsi libellée (traduction française de la version originale russe) :
« Je soussignée (...) ai mis au monde un garçon à la clinique maternité (...) de Moscou. Les parents de l’enfant sont un couple marié d’Italiens, Giovanni Campanelli, né le (...) et Donatina Paradiso, née le (...), qui ont déclaré par écrit vouloir implanter leurs embryons dans mon utérus.
Sur la base de ce qui précède et conformément à l’alinéa 5 du paragraphe 16 de la loi fédérale sur l’état civil et à l’alinéa 4 du paragraphe 51 du Code de la famille, je donne mon consentement pour que le couple ci-dessus soit inscrit sur l’acte et sur le certificat de naissance en tant que parents de l’enfant dont j’ai accouché. (...) »
Aucun détail sur la suite de la procédure pénale ouverte contre les requérants n’a été fourni par les parties, mais il semble que cette procédure soit toujours pendante.
Contrairement aux affaires similaires concernant la France, l’État italien a fait appel de sa condamnation.
Dans la Rome antique, la maternité pour autrui était admise à titre subsidiaire. L'expression « ventrem locare » désignait notamment le procédé permettant de solliciter les services d'une femme fertile pour donner un enfant à une femme qui était stérile ou qui mettait au monde des enfants mort-nés.
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